Les forces gouvernementales afghanes ont combattu les combattants talibans dans et autour de plusieurs villes jeudi, selon des responsables, alors que les militants poursuivent leur offensive qui, selon les services de renseignement américains, pourrait leur permettre de prendre le contrôle de la capitale, Kaboul, dans les 90 jours.
La rapidité de l’avancée des talibans – ils ont capturé huit capitales provinciales en moins d’une semaine et menacent d’en prendre au moins trois autres – a suscité de nombreuses récriminations à l’encontre de la décision du président américain Joe Biden de retirer les troupes américaines et de laisser le gouvernement afghan se battre seul.
De plus en plus présent en l’Afghanistan
Les talibans contrôlent environ deux tiers de l’Afghanistan, les dernières forces internationales dirigées par les États-Unis devant quitter le pays d’ici la fin du mois. Leur armée de guérilla a mené une guerre sur plusieurs fronts, ce qui a poussé des milliers de familles à fuir les provinces dans l’espoir de trouver la sécurité dans la capitale, Kaboul.
“Les combats n’ont pas cessé jusqu’à 4 heures du matin, puis après les premières prières, ils ont repris”, a déclaré un travailleur humanitaire dans la ville de Kandahar, dans le sud du pays.
Les combats ont été extrêmement intenses dans la ville de Kandahar, a déclaré plus tôt un médecin basé dans cette province du sud. L’hôpital de la ville a reçu des dizaines de corps de membres des forces armées et de talibans blessés. Les talibans ont déclaré avoir capturé la prison provinciale de Kandahar.
Ils ont également déclaré avoir pris la ville de Ghazni, à 150 km au sud-ouest de Kaboul. On pouvait entendre des coups de feu en arrière-plan, alors que Reuters s’entretenait avec le porte-parole du gouverneur de la province. Il a déclaré que les militants avaient également capturé la prison de cette ville.
Les talibans ont déclaré qu’ils s’étaient emparés des aéroports situés à l’extérieur des villes de Kunduz et de Sheberghan, dans le nord, et de Farah, dans l’ouest, ce qui rend encore plus difficile l’approvisionnement des forces gouvernementales assiégées.
Lashkargah aurait été pris
Les talibans ont également déclaré avoir pris le siège de la province de Lashkargah, la capitale de la province méridionale de Helmand, un foyer d’activité militante.
Les représentants du gouvernement n’étaient pas immédiatement disponibles pour un commentaire.
Bordant le Pakistan, Kandahar et d’autres provinces du sud et de l’est sont depuis longtemps le cœur des talibans, mais c’est dans le nord qu’ils ont réalisé leurs plus grands progrès ces dernières semaines.
Mercredi, la ville de Faizabad, dans la province de Badakhshan (nord-est), est devenue la huitième capitale provinciale à être prise par les talibans.
Désespéré par l’avancée des talibans, le président Ashraf Ghani s’est rendu à Mazar-i-Sharif pour rallier les anciens chefs de guerre à la défense de la plus grande ville du nord, alors que les forces talibanes se rapprochent.
M. Ghani a passé des années à mettre les seigneurs de la guerre sur la touche, alors qu’il tentait de projeter l’autorité de son gouvernement central sur des provinces indociles.
Pas de Mea culpa des américains
Le président Biden a déclaré mardi qu’il ne regrettait pas sa décision de se retirer et a exhorté les dirigeants afghans à se battre pour leur patrie.
Même lorsque les talibans dirigeaient le pays, ils ne contrôlaient pas tout le nord. Cette fois, ils semblent déterminés à le sécuriser entièrement avant de porter leur attention sur Kaboul.
À Washington, un responsable de la défense américaine a cité mercredi les renseignements américains selon lesquels les talibans pourraient isoler Kaboul en 30 jours et éventuellement s’en emparer en 90 jours, suite à leurs récents gains rapides.
“Mais ce n’est pas une fatalité”, a déclaré le responsable, s’adressant à Reuters sous couvert d’anonymat, ajoutant que les forces de sécurité afghanes pourraient inverser la tendance en opposant une résistance accrue.
Tous les points d’accès à Kaboul, qui se trouve dans une plaine entourée de montagnes, étaient encombrés de civils fuyant la violence, a déclaré une source de sécurité occidentale, ajoutant qu’il y avait un risque que des combattants talibans se trouvent parmi eux.
Les quartiers diplomatiques sous haute tension
“La crainte est que des kamikazes pénètrent dans les quartiers diplomatiques pour faire peur, attaquer et s’assurer que tout le monde parte à la première occasion”, a-t-il déclaré.
Les talibans, qui ont contrôlé la majeure partie de l’Afghanistan de 1996 à 2001, date à laquelle ils ont été chassés pour avoir hébergé le chef d’Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, après le 11 septembre, veulent renverser le gouvernement soutenu par les États-Unis et réimposer une loi islamique stricte.
Une nouvelle génération d’Afghans, qui a atteint sa majorité depuis 2001, craint que les progrès réalisés dans des domaines tels que les droits des femmes et la liberté des médias ne soient perdus.
Les Nations unies ont déclaré que plus de 1 000 civils avaient été tués au cours du mois dernier, et le Comité international de la Croix-Rouge a indiqué que, depuis le 1er août, quelque 4 042 blessés avaient été soignés dans 15 établissements de santé.
Les talibans ont nié avoir ciblé ou tué des civils et ont demandé une enquête indépendante.
